Pourquoi veut-on devenir manager ?
Illustration : @demaincommenceajourdhui / https://www.instagram.com/demaincommenceaujourdhui/
J’ai écrit un certain nombre de livres sur le management pour expliquer comment bien exercer ce métier, un très grand nombre d’articles pour faire de même et j’ai réalisé hier que je n’avais jamais essayé de répondre à cette question toute simple : pourquoi quelqu’un veut-il devenir manager ?
C’est vrai quoi, pourquoi choisir un métier dans lequel la pression est forte, où vous vous faites engueuler souvent, où les problèmes à gérer du matin sont remplacés par les problèmes à gérer de l’après-midi ? Sadomasochisme primaire ? Il y a probablement un petit peu de cela… mais pas que.
Vous ne le savez peut-être pas, mais j’ai été manager pendant plus de 20 ans. De petites équipes de quelques personnes à des équipes de plusieurs centaines… et j’ai adoré ce métier. Et quand vous managez de grandes équipes, forcément, vous manager des managers, vous les accompagnez, vous les formez ; et c’est cela qui m’a mené à faire le(s) métier(s) que je fais aujourd’hui. Dans ma carrière, j’ai croisé tellement de managers qui étaient un peu perdus, et ce métier me semblait tellement « simple » parce que basé avant toute chose sur le bon sens, que j’ai décidé d’essayer d’expliquer comment bien le faire.
Mais au commencement… il y a quoi ? J’ai entendu beaucoup de manager me dire « ohlala Gaël, qu’est-ce que c’est difficile d’être manager ». Et à chaque fois, je fais la même réponse : « oui, bien sûr, c’est difficile d’être manager, mais, rappelez-moi, qui vous a forcé à accepter le poste ? Aviez-vous un pistolet sur la tempe au moment d’accepter le poste ? ».
Non, bien sûr, devenir manager est un choix ; par contre, dans ce qui pousse quelqu’un à accepter la mission de manager, il y a des éléments qui vont permettre de tenir la pression et d’autres, réels, qui ne le feront qu’à court terme et qui petit à petit vont disparaître jusqu’au point où la personne va se demander « mais pourquoi ai-je accepté d’être dans cette galère ? »
1- Les raisons éphémères
Peu de managers vous le diront de façon aussi franche, mais, bien entendu, les motivations égocentriques existent : gagner plus d’argent, avoir un peu plus de pouvoir, pouvoir briller socialement. Ces raisons ne sont pas très « jolies », mais elles sont réelles, surtout pour les managers de ma génération (ie autour de 50 ans).
Dans ma génération, devenir manager était une sorte de passage obligatoire pour pouvoir dire « j’ai réussi ma carrière ». Mais ces raisons ne durent qu’un temps et les nouvelles générations l’ont bien compris, et tant mieux. Moins de 20% des générations Y et Z souhaitent devenir manager non pas parce qu’elles estiment que le métier de manager n’a aucun intérêt, mais parce qu’elles savent qu’il est tout à fait possible de s’épanouir dans son travail et de « réussir », sans jamais devenir manager.
Je me rappelle parfaitement bien de la fierté que j’ai eu lorsque j’ai eu mon premier poste de manager… mais très vite, la fierté a été remplacée par quelque chose d’autre : l’amour de ce métier.
"N’essayez pas de devenir un homme qui a du succès, mais plutôt de devenir un homme de valeur." Albert Einstein
2- Les raisons durables
En fait, si les seules motivations pour être manager sont celles décrites ci-dessus, il y a peu de chance que la personne devienne un bon manager qui sache motiver ses troupes. Pour être un bon manager, les motivations ne peuvent être qu’autocentrées. Aujourd’hui, je ne suis plus manager et je sais sans aucun doute possible quelles sont les motivations que l’on peut avoir pour être manager, car ces raisons me manquent.
· Le plaisir de la meute
Être manager, c’est comme diriger une meute, faire en sorte qu’elle se porte bien, se battre pour qu’elle aille le plus loin possible, être prèt.e à la défendre contre toute agression. Être manager, c’est avant toute chose une grande fierté personnelle de pouvoir se dire au quotidien que si ces personnes aiment venir au travail chaque jour, c’est en grande partie grâce à vous.
Le manager donne une direction, un sens à l’action collective… et s’il ne s’est pas trompé en donnant cette direction… quelle satisfaction !
· Le plaisir de l’action
Être manager, c’est être responsable. Si quelque chose ne fonctionne pas dans son équipe, c’est de sa propre responsabilité. Et il en va de même quand tout va bien. Quel immense plaisir de faire en sorte que toute l’équipe se porte bien, soit motivée, soit prête à tout donner pour atteindre ses objectifs. Mais cela ne se fait pas par magie, c’est la responsabilité du manager.
Oui, manager une équipe est un art complexe, stressant très souvent ; mais c’est justement le fait que ce soit difficile qui fait que quand cela fonctionne, le manager en tire une grande satisfaction personnelle. Un manager heureux, je crois, c’est un manager qui a conscience de sa responsabilité face au quotidien et qui sera heureux de faire briller son équipe en cas de succès.
Un manager heureux est souvent un manager qui saura faire preuve d’humilité car, au final, le vrai travail, c’est son équipe qui le fait.
CONCLUSION
Je sais, la comparaison n’est pas toujours acceptée, mais être manager, c’est exactement comme un parent avec ses enfants : c’est souvent complexe, souvent ingrat, mais on en tire une satisfaction incroyable quand on les voit grandir, progresser. Et je dois bien dire que l’une de mes plus grandes satisfaction en tant que manager, c’était quand un collaborateur ou une collaboratrice venait me voir, l’air un peu géné.e pour me dire : « Gaël, je suis désolé, mais je vais devoir démissionner, j’ai trouvé un travail ailleurs, et c’est grâce à tout ce que tu m’as appris que j’ai pu avoir ce poste ».
Et oui… être manager, c’est peut-être avant toute chose d’accompagner chaque membre de son équipe afin qu'il "grandisse".
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